Réformes de l’administration parisienne : Un été « calme » avant une rentrée « tempétueuse » ?
De même que l’application du règlement temps de travail aux personnels parisiens provoquera sans nul doute des tensions, voire même des conflits à la rentrée, avec l’étude dans chaque direction des différents cycles de travail, les nombreuses réformes engagées par l’administration pour mettre en place les « projets de mandature » risquent de faire de même.
A l’arrivée des congés estivaux, un petit point d’étape sur les réformes nombreuses et variées de notre administration ne paraît pas superflu, d’autant plus que les agents de la Ville de Paris, qui se sont investis pleinement pendant la crise sanitaire pour assurer les missions qui sont les leurs et pour que puisse continuer le service public parisien, se trouvent confrontés à de nouvelles crises, cette fois-ci endogènes à la collectivité parisienne.
La municipalité a impulsé pléthore de réorganisations et projets, se lançant dans une incompréhensible course contre la montre, alors que la première année de la nouvelle mandature venait à peine de s’achever, pour que tout soit acté avant la fin de cette année pour un début d’exécution en janvier 2022.
Police municipale parisienne, direction de l’environnement, réforme de la territorialisation, et dans le domaine social, la création de la direction de la santé et le Paris Action Sociale et tout cela en plus du règlement du temps de travail et du développement du télétravail. tel est l’inventaire, non exhaustif, des projets en cours.
Les agents sont inquiets. Ils craignent pour la préservation de leurs acquis sociaux, pour la qualité de leur vie au travail et pour la pérennité de leur statut. Certains ne savent toujours pas à quelle direction ils appartiendront demain ou de quelle autorité hiérarchique ils dépendront et tous se demandent quelles seront les conséquences concrètes sur leur vie professionnelle mais également personnelle des nouvelles organisations induites par un règlement du temps de travail qui succèdera dès le 1er janvier 2022 à l’accord cadre négocié en 2001 avec les organisations syndicales et par le « big-bang de la proximité à Paris »…
Et ce sentiment est d’autant plus exacerbé, qu’en ce début des vacances estivales et après plus de 6 mois de réunions, rien de concret ne se dessine clairement, si ce n’est l’annonce « d’une transformation très profonde de l’action publique parisienne ».
Quels que soient les projets, nous n’en sommes toujours qu’à l’esquisse d’« organisations fines, mais sans organigramme défini ou stabilisé », avec des cycles de travail non encore finalisés et à une nouvelle organisation territoriale de la municipalité, sans déconcentration des liens hiérarchiques (sauf pour quelques rares emplois identifiés) et qui se fera avec une grande implication des maires d’arrondissement.
Pour reprendre quelques exemples d’une terminologie universelle en vogue, « Désilotage, accueil inconditionnel, Paris du quart-d’heure, maillage territorial flexible selon l’action menée et pour répondre mieux aux attentes des Parisiens » semblent être, les fondamentaux sur lesquels s’appuiera le service public parisien de demain avec comme échelon de référence l’arrondissement.
S’il est indéniable que tout service public doit s’adapter à l’évolution de la société mais également apprendre des difficultés rencontrées au quotidien pour se renouveler, cependant, le rythme effréné de toutes ces réformes, qui pour certaines s’enchevêtrent avec celle qui semble être la réforme suprême de cette mandature, la territorialisation, interpelle. L’UNSA espère qu’à la fin du processus ce ne sont pas les agents qui s’en trouveront achevés ni le service public parisien exécuté.
Ainsi, à la DASES, que ce soit pour la future direction de la santé ou pour le Paris Action Sociale qui verront le jour début 2022, nous n’avons toujours aucun élément concret sur la gestion des ressources, l’organisation des services, les nouveaux liens fonctionnels et/ou hiérarchiques, les offres de mobilité, la charge de travail, la mutualisation des tâches, les locaux (centraux et déconcentrés).
Malheureusement, cette situation n’est pas l’apanage de la DASES car, après plus de six mois d’échanges, la seule certitude qui est la nôtre est de n’en avoir aucune, tant le manque de précisions sur les différents projets en cours est patent. Or, seul un éclaircissement de ces petits « points de détail » permettrait de pouvoir réellement évaluer les conséquences de cette « profonde transformation de l’administration parisienne » sur les agents, leurs missions et leur vie quotidienne.
Quant au problème du manque d’attractivité de la collectivité parisienne, il demeure entier et semble devoir rester plus que jamais prégnant. La désaffection du service public parisien dont les causes sont pourtant connues, des conditions de travail souvent difficiles, des postes budgétaires non pourvus et une politique salariale peu dynamique, devrait faire l’objet d’une politique volontariste de la part de la municipalité. Celle-ci, malgré des efforts réels qu’il convient de souligner, ne semble pas avoir encore trouvé la panacée permettant de résoudre ce problème, qui mériterait une approche globale et non parcellaire pour répondre aux besoins les plus pressants.
Car si attirer c’est bien, retenir c’est mieux.
L’UNSA ne doute pas de la bonne volonté de l’administration de vouloir préserver les métiers et les conditions de travail des agents ni de vouloir améliorer la qualité du service rendu à l’usager parisien, cependant elle reste convaincue que le rythme des réformes envisagées est tout à fait déraisonnable.
Surtout, au regard de la légitime ambition de la municipalité de vouloir créer l’administration parisienne 2.0, entre territoire parisien et territoire métropolitain, les moyens humains et financiers futurs, souvent maintenus à périmètre constant, apparaissent bien trop insuffisants pour assurer un cadre protecteur aux agents et leur garantir une bonne qualité de vie au travail.
« Fluctuat nec mergitur », jamais devise ne semblât aussi appropriée qu’aujourd’hui, tant notre navire parisien est balloté et secoué par les flots des multiples réorganisations entreprises par l’exécutif parisien. Espérons seulement que prise dans le tourbillon de trop de tempêtes, la coque de notre nef ne cèdera pas.
« Mutatis mutandis », en changeant ce qu’il faut changer certes, mais sans aller à vau-l’eau.